Le cri d’Olivia Maurel contre la marchandisation des corps
À travers un récit autobiographique poignant, Olivia Maurel livre son expérience d’enfant né par gestation pour autrui (GPA) et pose un regard critique sur cette pratique, appelant même à son abolition universelle. Cependant, une question persiste pour le lecteur une fois le livre refermé : peut-on réellement attribuer toutes ses difficultés personnelles aux conditions de sa naissance ?... L’article Le cri d’Olivia Maurel contre la marchandisation des corps est apparu en premier sur Causeur.
À travers un récit autobiographique poignant, Olivia Maurel livre son expérience d’enfant né par gestation pour autrui (GPA) et pose un regard critique sur cette pratique, appelant même à son abolition universelle. Cependant, une question persiste pour le lecteur une fois le livre refermé : peut-on réellement attribuer toutes ses difficultés personnelles aux conditions de sa naissance?
Une voix pour les enfants nés de la GPA
Olivia Maurel, née en 1993 par GPA aux États-Unis, entend être le porte-voix des enfants issus de cette pratique. Dans son ouvrage, elle critique fermement ses implications éthiques et sociales. Active sur les réseaux sociaux, notamment TikTok où elle sensibilise sur ces questions de bioéthique, Olivia Maurel s’est fait connaître des conservateurs en avril 2024 après avoir fait la Une du Journal du Dimanche. Ses détracteurs, toutefois, cherchent parfois à minimiser son discours, arguant qu’elle est en réalité issue d’une procréation pour autrui (où l’ovule et la gestation proviennent de la mère porteuse) et non d’une gestation pour autrui (où seule la gestation est assurée par la mère porteuse). Une distinction qui ne change rien à l’enjeu fondamental de l’exploitation des corps.
Dans Où es-tu maman ?, Olivia retrace son parcours : de la découverte tardive de ses origines, grâce à un test ADN offert par sa belle-mère en 2022, jusqu’à son combat militant actuel. Ce test, reçu quelques mois après la naissance de son troisième enfant, a bouleversé sa vie en révélant des vérités longtemps dissimulées.
Aurait-elle préféré ne pas naître ?
La GPA, sujet très débattu et pratique qui reste interdite en France, est légale dans de nombreux pays comme les États-Unis, la Russie, l’Ukraine ou l’Inde. Elle permet à des couples infertiles, des femmes seules ou des couples homosexuels de devenir parents en ayant recours à une femme qui porte l’enfant pour eux.
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Olivia Maurel met en lumière le modèle économique qui sous-tend cette industrie. Dans de nombreux cas, les mères porteuses proviennent de milieux précaires et leurs corps sont utilisés comme des outils pour répondre à la demande de couples désireux d’avoir un enfant. Olivia dénonce cette marchandisation de la maternité, qu’elle qualifie de déshumanisante. Elle décrit un univers où « derrière la vitrine rose et bleue des cliniques spécialisées, se cache une réalité mercantile, sans frontières ni lois, exploitant le désespoir des couples en quête d’enfant ».
Le témoignage sans fard d’une descente aux enfers
Dans son livre, Olivia Maurel partage les impacts psychologiques qu’elle associe à la GPA. Elle raconte son enfance marquée par une atmosphère de silence et de secrets. Sa mère biologique, une Américaine, l’a portée et mise au monde « pour de l’argent ». Olivia évoque des moments troublants, comme lorsque, enfant, elle interroge sa mère sur son âge et obtient pour réponse : « – J’ai tuitan, – Ça veut dire quoi maman ? – Je n’ai pas d’âge »… Elle se souvient également de l’absence totale de photos d’elle bébé, de sa mère enceinte, ou de moments partagés à la clinique : « J’adore les albums photos. Et là encore, rien ne va. Il n’y a pas de clichés de ma mère enceinte, d’elle et moi à la clinique – bizarre. »
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Ce silence a contribué à un mal-être profond, exacerbé par un cadre familial dysfonctionnel. Olivia confie avoir traversé des épisodes autodestructeurs : alcoolisme, peur de l’abandon, et même une tentative de suicide après avoir été victime d’un viol. Grâce à une thérapie avec une psy et au soutien de son nouveau compagnon et de sa famille, elle entame une quête identitaire salutaire. Mais elle s’interroge : ce lourd secret familial pèsera-t-il aussi sur la relation qu’elle entretient avec ses propres enfants ?
Un appel à l’abolition universelle de la GPA
Le témoignage d’Olivia Maurel interpelle sur les conséquences psychologiques de la GPA pour les premiers concernés : les enfants nés de cette pratique. Elle fait partie des premières générations à témoigner et invite la société à écouter ces voix pour en tirer des leçons. Est-elle un cas isolé, ou ce modèle conduit-il systématiquement à des quêtes identitaires douloureuses ?
Pour Olivia, la réponse est claire. Elle milite pour une abolition universelle de la GPA. Elle republie enfin à la fin de son ouvrage la déclaration de Casablanca de 2023 appelant les États à s’engager pour une convention internationale interdisant cette pratique. Elle propose des alternatives comme l’adoption ou une révision des lois sur la parentalité, pour permettre à tous ceux qui souhaitent fonder une famille de le faire sans marchandiser la vie humaine. « Il existe aujourd’hui 36 millions d’esclaves dans le monde. Devrions-nous pour autant rétablir des lois encadrant l’esclavage ? Non. Jamais. Même chose pour la GPA », conclut-elle.
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