“Flow”, ou la contemplation à l’état sauvage

Auréolé de quatre prix au Festival d’Annecy 2024, « Flow » est à l’affiche dans les salles françaises depuis le mercredi 30 octobre dernier.

Jan 26, 2025 - 21:42
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“Flow”, ou la contemplation à l’état sauvage

Présenté au Festival de Cannes en mai dernier, et auréolé de quatre prix au Festival d’Annecy le mois suivant, « Flow » est à l’affiche dans les salles françaises depuis le mercredi 30 octobre 2024. L’occasion de s’évader un peu de la morosité ambiante, et de prendre le large dans cet univers sauvage, peuplé d’animaux attachants et de monstres marins à la force tranquille.

L'introduction du film Flow.

Le Pitch

Dans un monde où l’humanité semble avoir disparu, un chat tente de survivre à une montée des eaux généralisée. Alors qu’il trouve refuge sur un bateau à voile, en compagnie d’un labrador un peu trop joyeux, d’un capybara paresseux, d’un lémurien cleptomane et d’un serpentaire blessé, les animaux commencent à coopérer. De nature très solitaire, s’entendre avec ses nouveaux compagnons sera pour le chat un défi plus grand encore que surmonter sa peur de l’eau. Sur le bateau, tous devront s’entraider et apprendre à surmonter leurs différences, pour survivre à ce monde nouveau.

Contempler l’état sauvage, loin de tout anthropomorphisme

Le réalisateur de Flow le dit lui même, l’idée originale du film était de traduire le monde animal, en s’efforçant de transposer le moins possible des comportements humains sur les différentes créatures peuplant cet univers étrange. C’est ainsi que tout en contemplation, et fort d’une direction artistique qui rappelle l’univers du jeu-vidéo indépendant (on pense évidemment à Journey, mais aussi à un certain Meadow, jeu dans lequel on incarne un animal de son choix, et où l’on doit collaborer avec d’autres joueurs / joueuses pour trouver des gemmes dans un environnement sauvage, en communiquant uniquement par des signaux propre à notre personnage), le film présente l’odyssée sur un bateau de cinq animaux d’espèces différentes, du point de vue d’un chat noir, effrayé par l’eau et les autres créatures qu’il croise sur son chemin.

Bande-annonce du jeu-vidéo Meadow, qui partage de nombreuses similarités avec le film Flow.

Loin de toute forme de parole ou d’écriture, la communication animale se substitue ici aux interactions sociales, et c’est d’ailleurs tout le propos du film : montrer comment les bêtes peuvent développer, sous la contrainte d’un bouleversement de leur éco-système, des comportements de coopération et d’entraide.

Les quatre compagnons du film Flow.

Quand les animaux font société (à leur manière)

Si la montée des eaux n’est qu’un prétexte pour faire évoluer les personnages, et les pousser à la coopération, le choix du chat n’est évidemment pas un hasard, tant il s’agit d’un animal solitaire. À cet égard, il devra donc se dépasser, faire fie de sa peur de l’eau, mais aussi, apprendre à faire confiance à ses compagnons de route pour survivre face au déluge et aux multiples dangers qui se dresseront sur sa route.

D’abord méfiant face aux créatures et au monde qui l’entoure, le chat vit reclus dans une sorte de grange, ou des maîtres semblent l’avoir laissé seul, entouré par des oeuvres d’art à son image. Sacralisé par le genre humain, cet être mutique, auquel on pourrait prêter une certaine forme d’orgueil (notamment dans son altercation avec l’un des chiens errants au début du film), sera donc poussé par les éléments à laisser l’individualisme derrière lui, pour entrer en communauté avec d’autres espèces. Un propos subtilement intégré dans les altercations entre les protagonistes, sous le prisme d’un naturalisme bien senti.

Comme le dit le réalisateur Gints Zilbalodis « Notre travail à consisté à observer la nature d’abord, puis à l’interpréter. ».

Aucun dialogue donc, mais seulement des animaux se comportant comme tels. Et aux termes du voyage, la conscience de soi et d’appartenance à un groupe, ainsi qu’à un monde plus grand.

Batteau flottant dans le film Flow.

Un film à voir ?

Dans une forme hybride entre esthétique de jeu-video et de film d’animation, Flow est un voyage silencieux et contemplatif dans un monde exempt de présence humaine. Avec ces baleines majestueuses et ses créatures douées d’une empathie qu’on croirait parfois perdue chez l’Homme moderne, le film propose une sorte de pas de côté, et de mise en perspective. Un parti partis pris sauvage, et un regard d’une grande clairvoyance sur le monde du vivant, qui fait du bien au moral, et qui nous rappelle finalement à des sentiments qui dépassent les limites de notre humanité.