« Il faut en finir avec l’angélisme migratoire à Mayotte »

Immersion dans une île où l'immigration clandestine explose, les services publics sont submergés et l’insécurité règne. Dans son livre, notre ami médecin Alain Destexhe dresse un tableau accablant d'une situation incontrôlable, où la République perd pied... L’article « Il faut en finir avec l’angélisme migratoire à Mayotte » est apparu en premier sur Causeur.

Fév 7, 2025 - 20:41
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« Il faut en finir avec l’angélisme migratoire à Mayotte »

Immersion dans une île où l’immigration clandestine explose, les services publics sont submergés et l’insécurité règne. Dans son livre, notre ami médecin Alain Destexhe dresse un tableau accablant d’une situation incontrôlable, où la République perd pied.


Cet entretien a été réalisé avant que l’Assemblée nationale n’adopte le 6 février en première lecture la proposition de loi pour restreindre le droit du sol à Mayotte NDLR.


Causeur. Que faisiez-vous à Mayotte l’été dernier ? 

Alain Destexhe. J’ai travaillé pendant deux mois dans le centre de santé de référence pour tout le nord de Mayotte qui est situé à Dzoumogné. Là-bas il y a beaucoup de résidents illégaux, et la moitié des consultations sont avec des clandestins. Je connais bien la France, puisque j’y travaille, et l’Afrique, puisque je vis une partie de l’année au Rwanda. Et j’ai beaucoup travaillé en Afrique, notamment pour Médecins sans frontières… Et j’ai ressenti un choc culturel en arrivant à Mayotte, parce que je pensais quand même arriver plus en France qu’en Afrique… et en fait j’ai constaté que l’aspect africain dominait sur l’aspect, disons, français, métropolitain. Ce constat m’a alors poussé à écrire un journal puis un livre.

Effectivement, vous écrivez dans votre introduction : « j’ai rapidement été convaincu qu’il fallait partager l’expérience que j’ai vécue sur cette île déstabilisée par des vagues migratoires sans fin, et où l’État semble complètement dépassé. » Aimeriez-vous que votre livre ait quelque influence sur l’opinion publique ou nos décideurs ?

La seule option que j’entends de temps en temps dans la bouche des personnalités de droite, notamment de M. Retailleau, c’est la suppression du droit du sol à Mayotte. Je pense que c’est très insuffisant. Car le droit du sol est en réalité déjà (un peu) limité à Mayotte. La suppression du droit du sol, si j’y suis évidemment favorable, ne produira des effets qu’à moyen voire à assez long terme. Si le but final des résidents illégaux est effectivement d’obtenir à terme la nationalité française et l’accès à l’Europe, c’est aussi de bénéficier dans l’immédiat des services de soins de santé qui sont 100 fois meilleurs qu’aux Comores et qui en plus sont gratuits. C’est aussi de pouvoir scolariser leurs enfants, puisque la République essaie de scolariser tous les enfants en dessous de 18 ans. Et, c’est globalement un niveau de vie bien supérieur à celui des Comores. 

Si même la remise en cause du droit du sol n’est pas la solution, quelles seraient celles à envisager selon vous ? 

 J’ai identifié trois principaux facteurs qui s’opposent aujourd’hui au rapatriement des illégaux et de ceux qui continuent à arriver : 

Le premier, c’est le fait que partout en France, le séjour illégal n’est plus un délit. Autrement dit, pour arrêter des résidents illégaux, la gendarmerie ou la police peuvent faire des barrages routiers, mais ils n’ont pas le droit d’entrer dans ce qu’on appelle les « bangas », ces bidonvilles, ces habitations précaires où habite la grande majorité des résidents illégaux, ils n’ont pas le droit d’y aller. Alors qu’on sait qu’il y a des quartiers entiers qui sont composés à 100% de résidents illégaux. C’est une première restriction très importante. Il faudrait donc rendre à nouveau le séjour illégal comme un délit et renvoyer les clandestins. 

Quel est le second ?

Le deuxième facteur : le problème de la polygamie, laquelle est interdite théoriquement. Elle a été tolérée dans la période de transition lorsque Mayotte est devenue un département, mais aujourd’hui, c’est interdit. Or, elle demeure très répandue. Pour une femme comorienne ou malgache, le meilleur moyen d’obtenir une carte de séjour et accéder à la nationalité française, c’est de se faire faire un enfant par un Mahorais. Donc, l’enfant est français, puisque le père est Mahorais, et ces femmes obtiennent automatiquement une carte de séjour. 75% des femmes qui accouchent à l’hôpital sont des étrangères. Il n’y a que 17 % des enfants qui naissent à Mayotte dont les deux parents sont français !

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Enfin, vous pensez qu’il faut refouler les kwassas ?

Oui, il faut les refouler ces « kwassa-kwassa »1. La gendarmerie et la police aux frontières interviennent, mais elles ne sont capables que d’en arrêter deux à la fois en mer, pas plus. Et elles ne peuvent pas les renvoyer directement aux Comores. Elles les emmènent à Mayotte, dans un centre de transit où les gendarmes trient… Ils sont obligés de garder les mineurs et les malades. Les mineurs sont envoyés par leurs parents des Comores en sachant qu’ils ne vont pas être renvoyés. Et parmi les malades, il y a en fait beaucoup de faux malades. Dans le doute, tous ces gens sont admis. Il faut cesser cette pratique, et renvoyer tout le monde. Et puis surtout, pendant que la gendarmerie trie les occupants d’un ou deux bateaux, vous avez une dizaine de kwassas qui attendent à la limite des eaux territoriales pour s’y précipiter.

La République est vraiment trop naïve. Il faudrait prioritairement agir sur ces trois problèmes avec des moyens alloués correspondants. C’est-à-dire permettre d’arrêter les gens dans les bangas, interdire la polygamie, ne plus trier ceux qui arrivent pour se concentrer sur la surveillance des eaux territoriales françaises. Cela permettrait de renvoyer plus de monde, mais aussi d’intercepter tous ceux qui attendent pendant le tri pour arriver.

Il arrive quotidiennement des migrants qui viennent des Comores, de Madagascar et même de l’Afrique des Grands Lacs. Mais il s’agit d’une grosse proportion de Comoriens, n’est-ce pas ? 

Oui, les migrants sont majoritairement des Comoriens (environ 90 %). Le trajet depuis les Comores est relativement peu onéreux (150-200 €), tandis qu’il coûte environ 1 000 € pour les Malgaches et jusqu’à 3 000 € pour les Africains continentaux, qui passent par Dar es Salaam en Tanzanie. Ce coût est un frein pour certaines populations, mais le déséquilibre économique est tel que beaucoup prennent le risque. 

Vous avez été stupéfait de découvrir qu’un couvre-feu officieux s’installait dès 18 heures. 

Oui, et c’était avant le cyclone Chido. C’est ce qui m’a frappé. Je rentre de Nouvelle-Calédonie, où il y avait un vrai couvre-feu instauré par l’État à partir de minuit. Mais à Mayotte, il n’y a pas de couvre-feu officiellement. Sauf que personne ne circule plus à partir de la nuit tombée. Les habitants ont peur de se faire attaquer par des dakous..

Qui sont justement ces « dakous » ? 

Ce sont de jeunes délinquants souvent abandonnés par leurs parents et livrés à eux-mêmes. Cette situation est directement liée à l’immigration : les enfants nés sur place de parents en situation irrégulière renvoyés aux Comores sont souvent laissés à eux-mêmes et sombrent dans la délinquance.

Sur France Inter, le démographe Hervé Le Bras envisage que « Mayotte rejoigne les Comores ». Est-ce inéluctable ? 

M. Le Bras, c’est l’archétype du démographe qui s’appuie sur des chiffres pour démontrer le contraire de la réalité. C’est un « dénieur » professionnel, il n’a aucune crédibilité pour moi.

Aujourd’hui Mayotte est un département français il doit être traité comme les autres départements. Maintenant, je ne vous cache pas qu’il fallait peut-être se poser la question avant de faire de Mayotte un département français. C’était l’une des nombreuses décisions à l’emporte-pièce de Nicolas Sarkozy. 

Certes, on l’a demandé aux Mahorais qui le voulaient majoritairement. Toutefois, il eut été judicieux de la demander aussi aux Français de métropole.

Reste qu’aujourd’hui Mayotte est un département français et que les Mahorais se sentent français. Contrairement à la Nouvelle-Calédonie et au ressentiment des « Kanaks »2, il n’y a aucun sentiment anti-français ou anti-blanc à Mayotte. Les Européens ne représentent même pas 1% de la population, l’île est entièrement noire et musulmane. Les Européens sont ceux qui viennent travailler comme gendarmes, professeurs ou dans le domaine de la santé.

La plupart des enfants passent deux heures par jour à l’école coranique avant ou après l’école de la République, apprend-on en vous lisant. Est-ce un problème pour l’intégration de cette jeunesse dans notre système républicain laïque français, selon vous ?

Oui. Tous les enfants vont à l’école coranique deux heures par jour. L’islam mahorais était tolérant, mais l’influence des madrassas3 et des prédicateurs d’Arabie Saoudite et du Golfe pourrait le radicaliser. Il faut être vigilant sur ce point. Certaines associations locales s’inquiètent d’ailleurs de l’influence croissante de courants plus rigoristes.

Un système éducatif qui est potentiellement en crise, un système de santé débordé par les migrants, le choc du cyclone, un taux d’homicide à Mayotte qui est cinq fois plus élevé qu’en métropole. La situation est pour le moins alarmante… 

La France a aussi construit des infrastructures magnifiques à Mayotte. Il faut voir le centre de santé où je travaillais, il est au niveau des infrastructures en métropole. Les écoles, aussi. Ce n’est pas comme si l’État n’avait rien fait. Il y a des terrains de foot, des salles de sport, des centres culturels. Les infrastructures sont bonnes, mais débordées par l’immigration. C’est sur le contrôle de celle-ci que doit se porter l’effort en priorité. C’est ce que demandent les Mahorais.


Alain Destexhe « Mayotte : comment l’immigration détruit une société » Editions Texquis, 102 pages.

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  1. Kwassa-kwassa (ou kwasa kwasa) est le nom comorien d’un type de canots de pêche rapides de 7 à 10 m de long pour 1 m de large, à fond plat et équipés aujourd’hui d’un ou deux moteur(s). On parle aussi de « drame des kwassa » pour parler des personnes qui périssent chaque année en tentant de se rendre sur l’île de Mayotte, de manière illégale et dont la traversée de 70 km dans un bras de mer est réputée pour être particulièrement périlleuseentre Anjouan et Mayotte. ↩
  2. Le peuple kanak (anciennement épelé canaque) est un peuple autochtone mélanésien implanté en Nouvelle-Calédonie, collectivité territoriale française du Pacifique Sud. Il constitue 41 % de la population totale de l’archipel, ainsi que la population majoritaire de la province Nord (72,2 %) et de la province des îles Loyauté (94,6 %). ↩
  3. Madrassa ou école coranique, est une école théologique musulmane sunnite, où un prédicateur prêche. ↩

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